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La phobie scolaire

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Quand l'école devient une source d'angoisse insurmontable

Fatigue, maux de tête et ventre en pagaille. Chaque matin, c'est la même histoire. Au moment d'amener votre enfant à l'école, il trouve toutes sortes d'excuses. Mais, est-ce vraiment un caprice? Ou votre bambin est-il en proie à un mal plus profond? Zoom sur la phobie scolaire, un trouble souvent méconnu mais très handicapant pour ceux qui en souffrent.

Si les signaux d'alarme peuvent être très spectaculaires (palpitations, crises de tétanie et d'angoisse...), Raphaël Gerber, chef du service de psychologie scolaire de la ville de Lausanne, se veut tout de suite rassurant: «moins d'1% des élèves sont concernés par cette pathologie qui relève de la pédopsychiatrie». Et de souligner qu'«il ne faut pas confondre l'absentéisme ponctuel avec la phobie scolaire». Un mal-être bien plus profond vis-à-vis de l'école envahit l'écolier en proie à ce trouble. «Epuisé tant physiquement que psychiquement, l'enfant victime de cette maladie ne parvient tout simplement plus à passer le seuil de l'établissement scolaire, explique Isabel Pérez, enseignante et conseillère pédagogique. La porte de l'école apparaît, à ses yeux, comme une barrière infranchissable, tant sur le plan symbolique que physique».

Se détacher, grandir et viser l'autonomie

Les origines de la phobie scolaire sont multiples. Parmi elles, on retrouve l'angoisse de la séparation des parents mais aussi la problématique de la responsabilisation de soi. A l'école, l'enfant doit prendre en charge son métier d'élève, ce qui implique d'être responsable vis-à-vis de ses obligations scolaires. «Grandir implique donc une certaine autonomie et un détachement affectif vis-à-vis des parents», souligne Raphaël Gerber. A ces causes peuvent s'ajouter la pression des parents sur la réussite scolaire dans une société qui glorifie la performance individuelle.

Quant aux moments propices à l'apparition de ce trouble, Raphaël Gerber souligne qu'«il est plus susceptible d'apparaître lors de transitions scolaires comme, par exemple, le passage à un cycle supérieur». Et de relativiser: «Etre angoissé de manière passagère face au changement est propre à l'être humain. Il s'agit d'une appréhension normale chez tout le monde». La situation devient problématique lorsque l'élève ne va plus à l'école ou sèche les cours de manière systématique et régulière. En cas de suspicion de trouble, seul un psychologue, un pédiatre ou un pédopsychiatre demeure apte à poser le diagnostic. Ce dernier prend en considération plusieurs facteurs: intensité des douleurs physiques, état du stress, niveau d'angoisse scolaire... Si la pathologie est avérée, un suivie psychothérapeutique demeure alors nécessaire.

Un mal pernicieux

Souvent, la phobie scolaire s'installe progressivement. Elle n'apparaît pas du jour au lendemain. «Mais il y a toujours un facteur déclencheur qui peut-être une situation conflictuelle avec le groupe ou l'enseignant voire un problème d'apprentissage», indique Isabel Pérez. «Certaines fois, cela peut être un cours qui génère des angoisses, comme la gymnastique», renchérit Raphaël Gerber.

Mais plus le mal s'installe, plus l'enfant aura de la peine à reprendre le chemin de l'école. Inversement, l'absentéisme répété peut engendrer une phobie scolaire. «Le passage du je ne veux plus aller à l'école au je ne peux plus me rendre en classe s'effectue rapidement», précise Raphaël Gerber. D'où la nécessité de repérer précocement les éventuelles craintes de l'élève vis-à-vis de sa scolarité. Si votre bambin se plaint fréquemment de mal de ventre ou dit qu'il est malade afin de ne pas se rendre en cours, mieux vaut écouter sa détresse que de le forcer à se lever du lit. «Dans ces situations, il convient d'écouter l'enfant sans porter de jugement», informe Raphaël Gerber. A ce propos, Anne-Marie Rocco, dont la fille Justine a été victime de phobie scolaire, rejoint le chef de l'enseignement: «Il faut prendre au sérieux la souffrance exprimée et ne jamais la banaliser. En outre, les enfants qui souffrent de ce trouble ont souvent une piètre image d'eux-mêmes. Il s'avère donc capital de leur redonner confiance en eux et de les convaincre qu'ils doivent continuer à étudier avec ou sans ses camarades scolaires».

En cas d'absence, il est, également, utile d'informer les autorités scolaires afin de trouver une solution avec tous les partenaires de l'éducation, dans le but de faire revenir le plus vite possible l'élève sur les bancs d'école. Et si l'écolier ne parvient plus à se rendre en classe durant plusieurs jours, des solutions existent: devoirs apportés à la maison, leçons à domicile, cours en ligne... «La plupart des situations problématiques se résolvent bien. Mais si elles perdurent, il vaut la peine d'aller plus loin en consultant un pédopsychiatre, un psychologue, une infirmière voire un médiateur scolaires», conclut Raphaël Gerber.


Les causes de l'absentéisme scolaire

Margrit Stamm de l'Université de Fribourg a conduit une recherche sur les raisons de l'absentéisme scolaire en Suisse. Il en ressort qu'un écolier sur deux sèche, occasionnellement, les cours et que 5% des élèves font, régulièrement, l'école buissonnière (plus de 5 fois par an). Près de la moitié des enfants interrogés ont justifié leur absence pour des raisons de sommeil. 42% des élèves questionnés ont, en effet, répondu qu'ils ne s'étaient pas rendus à l'école car ils souhaitaient dormir plus. La seconde raison invoquée est le manque de motivation et de plaisir à l'école. Suivent des cours jugés ennuyeux et une mésentente avec l'enseignant. À noter que personne n'évoque le harcèlement scolaire ou la brutalité sur le préau. On apprend, également, que l'absentéisme scolaire commence tôt. Plus d'un tiers des écoliers ont fait le mur pour la première fois entre la quatrième et sixième année Harmos. Niveau excuse pour ne pas se rendre en cours, la majorité des élèves interrogés ont dit qu'ils avaient menti à leurs parents, en prétextant une maladie. Dans une famille sur trois, les parents sont prêts à signer une lettre d'absence à l'intention des enseignants. Et un écolier sur trois avoue avoir imité la signature de son père ou de sa mère.

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